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Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)

Publié le par Oxymore

Marie-Jo Sublet, que tous nous appelions "Ninou", nous a quittés le 28 janvier 2024.

C'est une page de l'histoire de Feyzin qui se ferme.

Nous avons évoqué ici son action en faveur de la ville de Feyzin, en qualité de maire surtout. Nous retrouvons son image dans un court extrait du film que j'avais fait lors du premier jumelage de Feyzin, avec la ville anglaise de Barton, en 1980 (voir dans ce blog article du 24 avril 2009)

Ninou, avec le maire de Barton, le 8 mars 1980

Voici ci-dessous le texte diffusé par la famille Feschet, lors de la cérémonie d'adieu:

Ninou est née à Lyon en 1936

Ses parents, Marie et Léopold FESCHET habitaient Saint-Fons. Marie était enseignante à l’école privée et Léopold chimiste à Rhône-Poulenc. Ils sont venus s’installer à Feyzin en 1938, rue de la mairie.

Après des études secondaires à la Xavière et au lycée Saint Just elle termina ses études supérieures à l’Ecole Technique qui lui permit ensuite de travailler à Rhône Poulenc dans un laboratoire de physique chimie.

Le 2 décembre 1960 elle se maria avec Bernard SUBLET, technicien agricole, qui a été victime d’un accident de la route un mois plus tard et est décédé le 9 janvier 1961.

Ce drame la décida à changer de profession et à s’engager auprès des familles en tant que travailleuse familiale.

Plus tard, elle deviendra directrice du regroupement de toutes les associations concernées sous le nom de l’ADIAF en 1972. Elle le restera jusqu’en 1982.  

Dans les années soixante, quelques militants de la jeunesse catholique – dont Ninou – constatant l’absence de structures de loisirs dans le secteur, ont imaginé et créé l’ORLEC, Organisation Régionale Loisirs et Culture.

Cette association s’adressait aux jeunes des villages environnants. Elle était ouverte à tous.

Dans ce cadre, nous avons participé à toutes sortes d’activités :

Ciné-club, fête de la joie, concerts, rencontres avec de jeunes allemands par exemple, spectacles à thème, séjour ski au Villard, camps d’été pour découvrir le monde, et la permanence du vendredi : retrouvailles joyeuses et animées.

 Ninou a été le ferment et la vitalité de l’ORLEC.

Avec son souci du partage, son écoute patiente, ses valeurs humaines elle restera un exemple.

Sa personnalité était rassurante pour les parents. Ainsi nos mères demandaient avant chaque départ « Y’a Ninou avec vous ? ». Un « oui » suffisait à calmer les doutes et les peurs ; pour nous c’était la promesse de plus de liberté, plus de culture, favorisant les valeurs du vivre ensemble avec la possibilité de créer des liens, de partager des moments de vie et des projets.

Avec Ninou et l’ORLEC on a fait l’expérience de la coopération, de la démocratie, de l’engagement.

Elle ne cherchait pas la gloire Ninou, elle voulait simplement que chacun s’exprime, s’épanouisse, trouve sa place et devienne le véritable acteur de sa vie. On a beaucoup discuté, confronté des points de vue. C’était le temps des « Carrefours », des débats, comme en 68 avec des intervenants venus d’horizons différents, des conférences autour d’un sujet de société ou d’actualité.

Discrète et efficace elle a fourni un travail essentiel pour le fonctionnement de l’association.

Elle savait écouter, favoriser le compromis en cas de difficultés.

Réservée elle dégageait cette simplicité qui la rendait proche des jeunes et permettait un vrai dialogue dans la confiance, loin de tout jugement.

Elle posait toujours un regard bienveillant et positif. A ses cotés on se sentait exister.

Ninou a accompagnés notre jeunesse. elle nous a aidé à grandir…. C’est une belle aventure ! Un vrai cadeau, une chance… Nous gardons dans nos cœurs les valeurs et la philosophie qu’elle nous a léguées.

Et puis…On l’a tellement aimée, tellement respectée, notre Ninou, si authentique, si fidèle….

Merci Ninou

Dès 1965, elle s’engage en politique est élue conseillère municipale de Feyzin.

Puis en 1977 elle sera élue maire socialiste de Feyzin jusqu’en 1989.

Elle sut, avec brio et compétence, administrer notre ville qui se développait rapidement à cette époque.

Il manquait beaucoup d’équipements culturels et sportifs : la demande de la population était forte.

L’équipe du conseil municipal en place était jeune et bien engagée dans différents syndicats, mouvements politiques ou autres, avait besoin d’un guide intègre et démocratique.

Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)

Je me souviens... L'ORLEC, bien sûr... J'étais jeune, mais je ne peux oublier les débats passionnés, animés par Ninou, à Limon (commune de Simandres, Rhône, en direction de Vienne), près de la chapelle Notre-Dame de Limon ; cela se passait en plein air, aux beaux jours, nous étions assis sur l'herbe, et, déjà, nous refaisions le monde...

Et tant d'autres événements et activités, sorties, voyages en Europe, organisés par l'association, qui a offert à de nombreux jeunes du canton la possibilité de s'ouvrir au monde.

Et puis le temps du militantisme politique, pour l'élection de l'équipe municipale, menée par Ninou, en 1977.

Et tant de changement à Feyzin, en ces quelques années (je reviendrai ultérieurement sur ces années de gestion municipale) !

Et je me souviens des grands yeux expressifs de Ninou et de sa voix chaleureuse...

Après la victoire de François MItterrand, en mai 1981, Ninou fut élue députée-maire aux élections législatives de juin (François Mitterrand était venu à Feyzin deux ans auparavant pour la Fête de la Rose).

(photo Le Progrès)

(photo Le Progrès)

Voici reproduits in extenso les témoignages (et textes) lors de la cérémonie du 1er février 2024 :

Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)
Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)

Murielle LAURENT Maire de Feyzin

Il existe des moments bien difficiles dans la fonction de maire : celui de rendre hommage à ses prédécesseuses ou à ses prédécesseurs. Après, Jacques Chaîne en 2018, Angèle Orard en 2019, nous voici réunis pour rendre hommage à Marie-Josèphe Sublet, Maire de Feyzin de 1977 à 1989.

Elle fut la première femme maire de Feyzin.  

Son engagement et son action restent aujourd’hui bien visibles des Feyzinoises et des Feyzinois. 

C’est à Marie-Jo Sublet que nous devons les équipements permettant le développement d’une offre culturelle et sportive dans notre commune. 

C’est grâce à Marie-Jo Sublet que la culture occupe une place particulière à Feyzin. En 1985, la construction d’un bâtiment dans le Parc de l’Europe est lancée. Il accueillera la première Maison des Jeunes, puis deviendra la bibliothèque municipale et aujourd’hui la Médiathèque. 

En 1982, la place René Lescot connaît de grands travaux : c’est la construction du Centre Léonard de Vinci. 

En 1982, Marie-Jo Sublet inaugure le boulodrome Claude Ballestra. 

En 1984, des terrains de tennis sont implantés à côté de l'École de musique. 

Ce ne sont là que quelques-uns des projets conduits par Marie-Jo, Maire. Mais ce sont des projets qui ont marqué notre Ville, des équipements toujours très utilisés par les habitants de notre commune.  

Je veux rendre hommage devant vous à celle qui marqua notre commune, qui marqua chacune et chacun d’entre vous par son engagement à la tête de notre ville pendant 12 années.

Il y a une dizaine d’années, j’ai eu l’honneur d’être invitée par sa famille à partager un moment avec elle. 

Je conserve de cet échange privilégié l’image d’une femme de convictions, déterminée, engagée, à l’écoute des autres, une femme qui avait à cœur de partager son expérience avec d’autres. 

A la femme politique qu’elle était, je veux dire devant vous qu’elle est un modèle qui inspire, qui a pu, je crois, créer des vocations, qui invite au respect. 

Marie-Josèphe Sublet manquera à Feyzin. Son nom et ses actions resteront à tout jamais dans l’histoire de notre commune.

Et nous pouvons collectivement la remercier. 

Merci Madame la Maire. 

Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)

 

Qui mieux qu’une femme comme Marie Jo pouvait tenir ce rôle ? Elle a su assumer cette fonction et ceci malgré une autre grande responsabilité prise en 1981. Elle faisait une confiance absolue en ses 6 adjoints qui disposaient de délégations dans leurs domaines respectifs. C’est Marie Jo SUBLET qui

aura ainsi donné l’élan de l’expansion à notre ville d’aujourd’hui. Notre ville dispose depuis : du Centre Léonard de Vinci, de la Médiathèque, du Centre des 3 cerisiers, d’une Ecole de musique, de la Place de la Bégude, d’un boulodrome, d’un complexe sportif au Stade Jean Bouin, et le mas de Regain pour les personnes âgées.

 

En 1981 elle est élue députée du Rhône de la 14° circonscription et siègera à l’Assemblée Nationale jusqu’en 1993. Pendant cette période elle défendit avec opiniâtreté de nombreux dossiers et c’était une fierté pour nous militants de la voir s’exprimer au perchoir au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Vice-présidente de l’Assemblée Nationale elle prenait de temps en temps son petit déjeuner avec le Président de la République François Mitterrand.

En 1998 elle est nommée Chevalier de la légion d’honneur.

Devenue alors plus disponible, elle s’engagera beaucoup au niveau syndical : CFDT Retraités,  

En effet, dès son entrée dans le monde du travail, elle militait déjà au sein de la CFTC.

En 1964, elle sera en plein accord pour l’ouverture et la transformation de la CFTC en CFDT.

Elle milita activement dans le milieu des travailleuses familiales.

En parallèle de sa carrière politique, elle a été une importante militante de l’UTR (union territoriale des retraités de la CFDT). Elle sera à l’initiative de la création de l’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie). L’UTR CFDT lui rend hommage pour toute son activité militante en lui adressant un salut fraternel.

 

C’est à cette époque qu’elle découvrit sa passion pour l’Art floral grâce à sa professeure et amie Irène Rolland.

En 2004, elle devint Présidente de l’association « Des Fleurs et des Arts à Feyzin ». Cette association a pour but de promouvoir et faire découvrir l’Art Floral.

Elle participa à de nombreux concours : Château de Bionnay, Bagatelle, Lyon Festival des roses anciennes.

 

Le spectacle vivant faisait partie de ses loisirs, elle a fortement soutenu la création théâtrale au Centre Léonard de Vinci. Plus tard elle a été abonnée à la Maison de la Danse pendant plusieurs années.

En 2002, la famille Feschet et quelques amis ont créé l’association « Les Ami(e)s de GAMBUS » dont elle a assuré la présidence. Association qui avait pour but d’assurer la pérennité et le devenir de l’œuvre artistique de Simone GAMBUS : une grande dame de la peinture contemporaine.

Tout au long de sa vie Ninou a œuvré sans relâche pour l’égalité Homme - Femme. Elle a défendu la parité pour que les femmes puissent enfin accéder aux mêmes postes que les hommes. Lors de ses mandats de députée elle a organisé des colloques au Centre Léonard de Vinci, concernant les droits des Femmes en présence d’Yvette Roudy, Georgina Dufoix, Huguette Bouchardeau, Véronique Neiertz.

Plus tard, elle a participé activement à la mise en place dans notre ville de « Des Femmes et des Arts » autour de la date symbolique du 8 mars.

Cette belle personne qui s’est engagée activement et avec force de caractère a vu ses dernières années s’assombrir.

Un voile noir de plus en plus épais s’est abattu sur elle. Petit à petit ça a été l’isolement, elle qui avait été si présente auprès des autres.

Puis tel un chiffon qui efface les mots et les chiffres sur le tableau, cette avilissante maladie d’Alzheimer a tout effacé : l’attention, la réflexion, le regard, le geste, la parole.

Ninou n’était déjà plus !

Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)

 

Melinda à Ninou
 

Il y a des moments inoubliables, des choses inexplicables, et des personnes incomparables

Il y a des rencontres qui marquent toute une vie ,
On n'oublie jamais une personne, on s'habitue seulement à son absence…

Ma chère Ninou, mon “ Ange protectrice”.
Ton départ laisse un vide immense dans mon cœur.

Celles et ceux qui ont eu la chance de croiser ton chemin dans la vie savent quelle personne magnifique, lumineuse, souriante, généreuse, pleine d’amour et pleine de noblesse, que tu as toujours été.

Les belles personnes sont rares ; elles ne se distinguent pas par leur visage, mais par leur âme.

Ce sont des personnes courageuses, des personnes simples de l’intérieur comme de l’extérieur.

Leur grandeur se mesure à la loyauté de leur cœur et l’humilité de leur âme.

Et, même si parfois la vie nous sépare de ces personnes, elles ont fait de nous une personne meilleure…et ça, c’est éternel.

Je suis très heureuse et honorée, d'avoir partagé avec toi une partie de ta vie. Toi qui étais une personne formidable, pleine d’humanité et de bienveillance, Tu m'as appris et apporté tellement de belles choses.

Comment t’oublier, alors que tu fais partie de la personne que je suis aujourd’hui.
Tu étais ma famille, une personne unique que je continuerais à chérir jusqu'à la fin de ma vie.

Il me faudra certainement très longtemps avant de réaliser que tu es partie,
Il me faudra certainement très longtemps...
Toute la vie même. Je ne t'oublierai jamais.
A Dieu... et merci pour tout.

Repose en paix
🖤

Feyzin 1 février 2024

Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)

J’ai été témoin de deux fins de vie (de personnes proches) qui se sont étirées sur 2 et 3 années, pour cette étape je ne peux employer le terme « d’accompagnement », qui convenait aux années précédentes.

Ces deux personnes ont fini leur vie dans une maison de retraite modèle : projet de vie et de soins exigeants, personnel formé, implication des familles.

A partir du moment ou on ne pouvait plus se parler, j’ai choisi d’aller donner le repas du soir une fois par semaine. Je ne pouvais supporter d’être présente sans rien faire et cela déchargeait un peu le personnel.

Quelques fois, un sourire, un battement de cil à la question « c’est bon ? », la main qui réagit un peu lors d’une caresse, puis plus rien. Pendant de longs mois le corps immobile, le visage sans expression, bouche ouverte. Seul le personnel peut alimenter. Les petits enfants ne viennent plus, les visites qui paraissent inutiles s’espaces, la famille admet mal les mensualités élevées.

Qu’y a-t-il d’humain dans la vie qui s’est écoulée pendant ces longs mois ?

L’esprit humain cherche un sens à ce qu’il advient, à ce qui se passe.

Et lorsqu’on dit « donner un sens à sa vie », c’est construire quelque chose d’épanouissant, grâce à l’action les liens avec les autres, la circulation des idées, l’amour échangé. Quelque chose d’utile à l’humanité, ce que l’on appelle « solidarité, engagement ».

Pour moi, pour vous ? c’est cela une vie vraiment humaine et Dieu est présent dans ces étincelles d’amour, dans ces étincelles de toute une vie, dont on imagine facilement qu’elles constituent la vie éternelle.

« Être un homme (une femme) en vérité » est-ce que cela s’applique vraiment à ceux qui subissent ce long engourdissement de l’enveloppe charnelle vidée d’humanité, (apparemment ?)

Et une autre question restée sans réponse : est-ce que ça ne pourrait pas avoir un sens d’être débarrassé un peu plus tôt de l’enveloppe charnelle privée d’humanité pour franchir le pas de la vie éternelle ?

(Marie-Josèphe Sublet, avril 2004)

Marie-Josèphe Sublet (1936-2024)

Le rêve                Martin-Luther King

 

Je fais le rêve, ce matin

qu’un jour, chaque noir,

chaque homme de couleur,

dans le monde entier,

sera jugé sur sa valeur personnelle,

et non pas sur la couleur de sa peau…

Je fais le rêve qu’un jour la fraternité

ne sera pas seulement quelques mots

à la fin d’une prière,

à la fin d’un discours…

Je fais le rêve

que dans tous les gouvernements

et toutes les municipalités

entreront des citoyens élus

qui rendront la justice

et aimeront  la pitié…

Je fais le rêve qu’un jour

la guerre prendra fin,

que les hommes transformeront

leurs épées en socs de charrue,

que les nations ne se  dresseront plus

les unes contre les autres

et qu’elles n’envisageront plus jamais

la guerre…

Je fais le rêve

que, grâce à cette confiance,

à cette foi,

nous serons capables

de repousser au loin

les tentations de désespoir

et de jeter une lumière nouvelle

sur les ténèbres du pessimisme…

Jour merveilleux,

les étoiles du matin chanteront ensemble,

et les fils de Dieu pousseront

des cris de joie.

 

« La mort n’est rien »  de H.H. Hulland

La mort n’est rien. Je suis seulement passé dans la pièce à côté.

Je suis moi, vous êtes-vous. Ce que nous étions les uns pour les autres, nous le sommes toujours.

Donnez-moi le nom que vous m’avez toujours donné. Parlez de moi comme vous l’avez toujours fait.

N’employez pas un ton différent, ne prenez pas un air solennel et triste.

Continuez à rire de ce qui nous faisait rire ensemble.

Priez, Souriez, Pensez à moi, priez pour moi.

Que mon nom soit prononcé comme il l’a toujours été, sans emphase d’aucune sorte, sans une trace d’ombre.

La vie signifie tout ce qu’elle a toujours signifié.

Elle est ce qu’elle a toujours été. Le fil n’est pas coupé. Pourquoi serais-je hors de votre pensée simplement parce que je suis hors de votre vue ?

Je vous attends. Je ne suis pas loin, juste de l’autre côté du chemin.

Vous voyez, tout est bien.

Feyzin 1 février 2024

RIP, Ninou !

(documents reproduits avec l'autorisation de la famille Feschet, que je remercie vivement)

{et désolé pour la publicité qui s'affiche dans mon blog...]

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